C’est un hommage personnel que je rends ici à Jacques Robinet avec qui j’ai partagé une amitié tardive mais profonde
à Renaud Allirand
Mon premier contact avec Jacques Robinet date de décembre 2019. Nathalie de Courson, une de ses amies, lui avait parlé de quelques pages du Flotoir que j’avais consacrées à son livre récemment paru aux Éditions La Coopérative, La Monnaie des jours. Livre qui m’avait profondément touchée et intéressée.
Jacques m’avait alors écrit une très belle lettre, la première d’une véritable correspondance qui s’est poursuivie sur quatre années et demie et qui s’est achevée tout récemment avec sa disparition. Les derniers temps, écrire lui était devenu impossible et son tout dernier message est un message vocal, bouleversant, déposé sur la plate-forme WhatsApp quelques jours avant sa mort ce samedi dernier, le 29 juin 2024.
L’œuvre de Jacques comprend deux parties que j’ai jusqu’alors considérées comme distinctes, mais il se peut que l’avenir me permette de tisser tous les liens nécessaires entre ces deux approches profondément solidaires, et toutes deux profondément inhérentes à sa vie si riche. La prose des notes, et sa poésie. J’ai eu le privilège de recevoir, souvent, dans ses courriels, des notes tout juste écrites. C’était un de nos modes d’échange, de partage, de communion.
Jacques a eu une vie saisissante, dont il parle un peu dans ses livres de notes. Il fut prêtre, quitta la prêtrise, et devint psychanalyste. Ce n’est que relativement tardivement me semble-t-il, je me demande même s’il ne m’avait pas confié que ce fut quand il cessa de recevoir la parole des autres, dans son métier, qu’il se mit à écrire ses notes quotidiennes. Notes où se mêlent des observations sur le ciel, sur la nature autour de lui, sur ses tourments spirituels tant cette question n’a cessé de le tarauder pour me semble-t-il trouver une sorte d’apaisement dans ses derniers mois, ses derniers jours. Je ne trahis ici rien de notre échange, car on peut suivre et lire cela dans ses livres et j’ai cru comprendre que d’autres livres verront le jour (le dernier paru porte sur les notes de l’année 2020).
Quatre livres de prose, donc, Un si grand silence (2018), sa première œuvre narrative, toute dédiée à la mémoire d’une mère adorée, La Monnaie des jours (2019), Notes de l’heure offerte (2022) et L’Attente (2023), tous quatre publiés aux Éditions de la Coopérative par Jean-Yves Masson et Philippe Giraudon. Il a également publié plusieurs livres de poèmes aux éditions Saint-Germain des Prés, dès 1984, aux Éditions La Tête à l’envers, L’Ail des Ours, Les Lieux-Dits et Unicité qui a tenu à publier deux derniers livres de poèmes juste avant sa disparition, L’Herbe entre les pierres et Le Vent souffle où il veut.
J’ai surtout lu et relu les livres parus à la Coopérative et les lecteurs de Poesibao qui connaissent mon autre site, personnel, Le Flotoir, savent à quel point ils ont été présents dans ce Flotoir. Certains livres, une fois qu’on les a terminés, et même si on les a aimés, on les referme et les range. Les livres de Jacques restent et resteront, j’en suis convaincue, à portée de main, je peux les ouvrir au hasard, je suis sûre d’y trouver quelque chose qui m’éclaire et qui m’aide à vivre. « J’écoute en moi ceux que le temps et l’oubli ne sont par parvenus à effacer ».
Poezibao et Poesibao m’ont fait quelques magnifiques cadeaux, bien des livres et des amitiés magnifiques et inspirantes, comme celle d’Antoine Emaz, comme celle de Jacques.
Presque tous ses livres comportent des encres, des gouaches, des dessins de son compagnon, le peintre Renaud Allirand. Que le courage lui soit donné de supporter la terrible absence et de continuer à faire vivre l’œuvre de Jacques, en l’éclairant de ses propres travaux.
Florence Trocmé
Je me suis permis de reprendre la photo de Jacques Robinet et Renaud Allirand sur le compte facebook de ce dernier, relayant une note des éditions La Coopérative.